Le mini-passif par l’exemple

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Fordaq JT
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Au coeur de la banlieue pavillonnaire francilienne, à Ermont, la taille un peu réduite de la maison cadre avec une parcelle en bordure de RER, voie d'accès vers un second pavillon Ecolocost, inclus.(Photos: JT)

En France, la maison passive est un marché d’autant plus embryonnaire que les maisons individuelles sont petites. Pour autant, une maison passive à ossature bois de 82 m2 de surface habitable ne se distingue pas fondamentalement d’une maison plus cossue, sur le principe. La bonne idée de l’entreprise Ecolocost, c’est en fait de ne pas adapter la technique au marché ou au climat français, de ne pas se caler sur les exigences performancielles du PassivHaus allemand, et seulement sur la partie enveloppe des exigences de moyen. Pour l’heure, on obtient ainsi une maison de 82 m2 habitable en R+1 dont le coût de construction net serait de 115 000 euros plus 15 000 euros de marge.

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Ce qu'on trouve en bois pas loin dans le quartier globalement très maçonné tendance meulière : un beau grand bardage douglas tout frais ... (Photos: JT)

Une tour technique à tout faire qui prend la place d'un frigo 

Comme l’explique Maxime Brard, le patron d’Ecolocost, difficile de se caler sur les exigences du PassivHaus en matière de consommation d’eau chaude sanitaire si le ratio au m2 se calcule sur une petite surface habitée par quatre personnes. Par contre, pour ce qui concerne le chauffage sans radiateurs, c’est plus facile encore avec un volume d’air de 200 m3. D’ailleurs, on choisissant par exemple cet équipement PAC Nilan certifié PassivHaus qui assure à la fois le chauffage, la ventilation double flux, l’eau chaude sanitaire et le rafraîchissement, on se dispense non seulement de l’espace réservé aux radiateurs, mais on concentre le noyau technique sur une tour d’emprise réduite à un peu plus que le frigo dans la cuisine.

 

 

Un bon coût pour l'écologie

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... et une MOB en construction, au moins clos couvert, mais à délai d'achèvement incertain.(Photos: JT)

Ecolocost, c’est un jeu de mot. Cela veut dire à la fois économique low cost , low cost écolo, et coût écologique. Si on prend l’acception la moins évidente, coût écologique, l’approche de l’équipe de Maxime Brard est tout à fait censée. Pour lutter contre le mitage de l’espace en zone urbaine, il n’y a pas que les bonnes vieilles tours et barres entourées de parking. 30 m2 de panneaux photovoltaïques pour 4 personnes, et un petit jardin, dans le cadre d’un lotissement de maisons accolées, donc encore plus efficaces en matière d’enveloppe, ça vaut sans doute les ensemble collectifs, d’autant qu’il faut respecter le plaisir d’habitants qui veulent se sentir chez eux. Ce serait une solution écologique intramuros même à Paris si on laissait de côté les gourmandises des opérations immobilières multi-étage, qui font que le foncier devient hors de prix.

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Cette autre maison Ecolocost est en bois et d'achèvement rapide, dans la même approche de mini-passif.(Photos: JT)

Quand Ecoquartier veut encore dire quelque chose

En clair, Ecolocost invite la solution pour lotissement en bande des écoquartiers dignes de ce nom. La solution pour les jeunes familles primo-accédantes ou aidées, en complément avec les solutions collectives, voire la tour en bois, ces autres créneaux sur lesquels la construction bois peut se positionner. Après une traversée du désert de la crise, Ecolocost tombe à pic au moment où un certain Nicolas Hulot accède à la fonction de ministre d’Etat, car on peut imaginer qu’il ne va pas laisser se galvauder encore davantage cette notion d’écoquartier qui était naguère dans toutes les bouches.  

Le BEPAS/BEPOS, bon sens économique

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Maxime Brard, le patron d'Ecolocost, en avance sur son époque en 2013, et en phase en 2017.(Photos: JT)

Pour ce qui est du coût de l’écologie, la réponse d’Ecolocost est cinglante. Selon Maxime Brard, il n’y a pas d’intérêt économique aujourd’hui à construire en RT2012, comparé au passif BEPOS. Le coût de l’énergie augmente d’année en année alors qu’avec son concept, les dépenses énergétiques restent nulles. Et dans dix ans, on peut tabler sur le fait qu’une maison BEPAS/BEPOS conservera une valeur marchande bien supérieure à celle d’une maison construite aujourd’hui pour répondre tout juste à la RT2012. C’est sans doute vrai, mais que disent les banques ? Ecolocost se place sur le segment d’entrée de gamme, la maison de moins de 100 m2 réputée à moins de 100 000 euros. Une maison Phénix de 80 m2 est proposée à 74 000 euros. Celle d’Ecolocost, en admettant que l’entreprise survive malgré une marge réduite à 15000 euros, atteint un coût construit de 130 000 HT, sans le foncier et sans préjuger de la marge éventuelle d’un promoteur ou cmiste. On n’est pas dans l’habitat low cost, mais plutôt dans la tranche haute de l’individuel réduit. Cela se mesure également dans les prestations : fenêtres oscillo-battantes, parquet à l’étage, cuisine et salle de bains équipées, équipement câblé grade 3 partout, accessibilité PMR. Possibilité de rafraîchissement, filtration de l’air induite par le système de ventilation double flux. 1600 euros HT/m2, 200 euros de plus selon Brard que pour une maison RT2012. 17 000 euros d’écart, dont 10 000 pour l’équipement et 7000 pour la porte aux qualités isolantes améliorées, les fenêtres triple vitrage, les murs surisolés.

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Plus de radiateurs ! Mais le patron de Promotelec, Dominique Desmoulins, ne fait pas gris e mine : sèche-serviette, PAC, panneaux photovoltaïques de la filiale EDF Photowatt ... et ce premier Label Effinergie BEPOS 2017 qui prouve haut et fort la compatibilité entre tout électrique et excellence écologique.(Photos: JT)

Transparence technique

Pour rappel de ce qu’est l’approche passive, la maison construite par Ecolocost à Ermont s’élève sur un radier thermique : du concassé, 20 cm d’isolant, une dalle de 20 cm coulée dans un moule isolant qui constitue également un écran thermique latéral en soubassement, 5 cm d’isolant, une chape liquide de 35 mm. Le site d’Ecolocost  détaille précisément ses solutions techniques et les commente. Comme si Maxime brard invitait à imiter pour que ce marché passif pavillonnaire décolle enfin. Le problème, c’est apparemment que personne en France ne veut fournir des éléments à montants KVH de 50x180 à double contreventement de plaques Fermacell, avec remplissage en laine de roche. Ecolocost va se fournir en Pologne. Certes, la main d’œuvre y est moins chère et son fournisseur dispose d’un outil de production à forte productivité, et moderne, qui livre l’Allemagne et d’autres pays. Tout de même, il faut payer le transport à travers l’Europe, pour des matériaux en principe disponibles en France, et des techniques de fabrication qui le sont a priori aussi. On peut donc penser que le recours à la Pologne n’est qu’une solution provisoire, même si le fournisseur détache dans le cas d’Ermont des monteurs spécialisés.

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Le président d'Effinergie, également vice-président de la nouvelle région Normandie en charge de l'environnement, est visiblement intéressé par l'approche Ecolocost à destination des écoquartiers.(Photos: JT)

Un concept simple à fort potentiel

La disposition des pièces de la maison d’Ermont est classique. Pas de radiateur mais pas d’espaces de rangement pré-équipés. Les chambres sont petites. L’escalier en hêtre croque un coin du salon, la cuisine est attenante au salon salle à manger. L'espace en combles n'est pas exploité, alors que la pente du toit est de 45°, il y a donc une réserve constructible potentielle. 

On remarque que les fenêtres proposées dans le cas d’Ermont sont en PVC triple vitrage, les volets en aluminium mais que les cloisons distributives sont à ossature bois, le plancher sur solives également et qu’il y a du parquet à l’étage. On peut imaginer une variante avec encore plus de bois, ainsi qu’une option avec garage sous-terrain et pièce à vivre en sous-sol, dans l’esprit de l’approche allemande de recours au béton préfa en soubassement. La mise en place de l’oscillo-battant pénalise apparemment la performance d’étanchéité à l’air de 3 centièmes. La formule passive a l’heureux effet de juguler l’inconfort acoustique en bordure immédiate de la ligne de RER, et là, on se dit que banco, la formule passive de Brard va sans doute aussi être un atour en zone aéroportuaire, on pourrait même imaginer que le surcoût passif soit directement pris en compte par les aéroports dans ces zones.

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Des chambres sans radiateur, ventilée par le sol. Fenêtres PVC oscillo-battantes qui dégradent un peu la performance en termes d'étanchéité à l'air.(Photos: JT)

Triomphe du bois

Ecoquartiers, zones de bruit, habitat de faible emprise, souci de recyclage et de non pollution du sol en fin de vie, voire de déconstruction facilitée.  L’approche de Ecolocost dispose de nombreux atouts en zone urbaine et périurbaine, et c’est en principe tout bénéfice pour la filière bois. Afcobois avec sa maison Premium tablait sur la maison à 100 000 euros tout en ménageant des possibilités d'adaptation régionales. En soi, la maison d'Ermont pose un nouveau jalon, la maison à 130 000 euros BEPAS/BEPOS. HT et coût de construction livré. C'est très utile pour gagner du temps. Gageons que la formule Premium est maintenant largement amortie, que l'implémentation d'une formule BEPAS/BEPOS représente un nouvel effort et qu'il se heurte sans doute à une forte résistance doctrinale selon laquelle une telle performance d'énveloppe est surfaite en France. Et selon laquelle le PassivHaus, c'est pour les bobos, pas pour l'habitant lambda. Le débat est (ré)-ouvert par l'équipe de Maxime Brard. C'est le moment de réinterroger les certitudes. Surtout que le BEPAS/BEPOS est en principe du pain béni pour la construction bois et un cauchemar pour la maçonnerie traditionnelle.

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PAC labelisée PassivHaus de la marque Nilan, gamme compacte P, qui s'insinue dans la cuisine comme s'il s'agissait d'un congélateur. (Photos: JT)

 

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